L’abolition des privilèges:
Constitution, Négociation, Révolution ?
65 ans après sa rédaction la Constitution tourne sur elle-même. Le décalage entre une Constitution et «sa » société définit le « moment constituant. Dominique Rousseau, professeur de droit public lance une alerte en citant Benjamin Constant (1767-1830) : Lorsque l’accord entre les institutions et les idées se trouve détruit, les révolutions sont inévitables.
Le président de la République propose une révision constitutionnelle ; mais le feu brûle autour de lui : inflation des prix, peur des immigrants, montée des extrémismes, déficit budgétaire, désordres européens, et par-dessus tout, désordres climatiques et sanitaires…
Aout 1789, Versailles.
Dans un excellent petit ouvrage ( l’Abolition des privilèges-édition Les Avrils-2022), Bertrand Guillot nous conte la nuit du 4 août à Versailles.
Après la Bastille le feu avait pris dans tout le pays.
On tuait des boulangers soupçonnés de cacher des réserves de farine.
Les paysans brûlaient les « terriers » où étaient consignés les droits qu’ils devaient payer aux seigneurs propriétaires de leurs terres. On réclamait la justice fiscale, et à défaut d’être entendu on provoqua la Grande Peur !
Mille délégués des trois états, l’aristocratie, le clergé et le Tiers, s’étaient réunis à Versailles dans la salle dite des Menus plaisirs depuis le mois de mai pour tenter de rédiger une Constitution pendant que le pays était à feu et à sang.
Les négociations s’éternisent depuis trois longs mois au grand plaisir de ceux qui disent vouloir changer pour que rien ne change…
Lorsque, soudain, les déclarations à la tribune de quelques-uns, ceux qui n’ont à la fois, presque rien à perdre, tout à gagner, et surtout le sens de l’intérêt général du pays, vont provoquer un intense séisme qui va parcourir les consciences des mille délégués :
Ce ne sont point seulement des brigands qui s’en prennent aux châteaux, mais un peuple tout entier, appauvri et désespéré, exaspéré contre les abus des seigneurs, et de leurs gens d’affaires souvent impitoyables.
C’est ainsi que s’exprime le Duc d’Aiguillon, deuxième fortune de France, qui propose tout simplement de négocier l’abandon du système entier, en commençant par la promotion d’une réelle justice fiscale.
Quand allons-nous avoir le signal donné par Bernard Arnault et sa famille, la famille Hermès, Alain et Gérard Wertheimer et leur famille, ou encore Françoise Bettencourt Meyers et sa famille pour une véritable révision de la Constitution de 1958 ?
Un autre évènement s’est produit à l’époque de la Révolution, non maîtrisable à l’époque, gérable aujourd’hui, le dérèglement climatique.
Révision constitutionnelle et transition écologique ? Pourquoi pas ?
Mais le recul des gouvernements nationaux et de la Commission européenne sur ce sujet, laisse présager des désordres immenses.
Revenons à Versailles en cette fin du XVIIIème siècle.
Depuis deux ans le climat s’est déréglé. (https://www.meteobelgique.be/article/articles-et-dossier/le-climat/81-climats-dhier-et-daujourdhui/2383-quand-la-meteo-ecrit-l-histoire-la-revolution-francaise#:~:text=Acte%20II%20%3A%20l’hiver)
Un volcan islandais, (ou plutôt une chaîne de 115 cratères volcaniques) est entré en éruption en rejetant des gaz soufrés et fluorés pendant qu’une autre éruption a lieu au Japon.
Nous sommes en 1783 et dès l’hiver, les fleuves européens vont être pris dans les glaces puis la débâcle sera dramatique pour la population.
Une suite d’événements météorologiques extrêmes va s’enclencher provoquant d’abord une moisson exceptionnelle en 1785 qui aboutira à une chute des prix des produits agricoles et des revenus, puis des épisodes de sécheresse avec des orages de grêle de forte intensité en juillet 1788, dont celui qui fera exploser toutes les vitres du château de Rambouillet où séjournait le Roi.
L’hiver qui va suivre va être glacial, – 21,8°C à Paris, la Seine gèlera pendant 56 jours consécutifs, jusqu’au 20 janvier. Toutes les rivières de France seront prises par les glaces ; le gel des rivières entraînera l’arrêt des moulins. Les pauvres, qui n’ont pas de réserves de farine, seront réduits à la misère et le prix du pain ne fera qu’augmenter. Dans les vergers, les arbres fruitiers périssent en grande quantité tout comme les noyers, les châtaigniers et, dans le midi méditerranéen, les oliviers.
Après l’hiver, les émeutes gagnent toute la France, en ville comme à la campagne. Elles se radicalisent dès février 1789.
Sans aller jusqu’à affirmer que le dérèglement climatique a causé la Révolution française de 1789, il faut bien, aujourd’hui que les experts savent le faire, corréler les flux d’immigration accélérés, les désordres urbains, les désespérances rurales, au dérèglement climatique.
Et que TOUS les acteurs de la société civile rejoignent ceux de la société politique pour renégocier ensemble une nouvelle abolition des privilèges.
Réviser la Constitution, mais en même temps, négocier au plus près des intérêts de chacun une véritable transition écologique pour que le sentiment d’injustice ne devienne pas le détonateur d’une autre Révolution encore plus sanglante.
Yves Halifa
4 août 2023
Laisser un commentaire